1.
La formulation des principes. Voici les principes fixés par
la Grande chambre de la Cour européenne des droits de l’Homme [CEDH,
gde ch., 20 oct. 2016, Mursic c. Croatie,
req. n° 7334/13] quant à l’appréciation de l’existence d’un
traitement inhumain et dégradant en cas de détention dans une cellule
surpeuplée :
« 137.
Lorsque la surface au sol dont dispose un détenu en cellule collective est
inférieure à 3 m², le manque d’espace personnel est considéré comme étant à ce
point grave qu’il donne lieu à une forte présomption de violation de l’article
3. La charge de la preuve pèse alors sur le gouvernement défendeur, qui peut
toutefois réfuter la présomption en démontrant la présence d’éléments propres à
compenser cette circonstance de manière adéquate (paragraphes 126-128
ci-dessus).
138.
La forte présomption de violation de l’article 3 ne peut normalement être
réfutée que si tous les facteurs suivants sont réunis :
1) les
réductions de l’espace personnel par rapport au minimum requis de 3 m² sont
courtes, occasionnelles et mineures (paragraphe 130 ci‑dessus)
;
2)
elles s’accompagnent d’une liberté de circulation suffisante hors de la cellule
et d’activités hors cellule adéquates (paragraphe 133 ci-dessus) ;
3) le
requérant est incarcéré dans un établissement offrant, de manière générale, des
conditions de détention décentes, et il n’est pas soumis à d’autres éléments
considérés comme des circonstances aggravantes de mauvaises conditions de
détention (paragraphe 134 ci‑dessus).
139.
Lorsqu’un détenu dispose dans la cellule d’un espace personnel compris entre 3
et 4 m², le facteur spatial demeure un élément de poids dans l’appréciation que
fait la Cour du caractère adéquat ou non des conditions de détention. En pareil
cas, elle conclura à la violation de l’article 3 si le manque d’espace
s’accompagne d’autres mauvaises conditions matérielles de détention, notamment
d’un défaut d’accès à la cour de promenade ou à l’air et à la lumière naturels,
d’une mauvaise aération, d’une température insuffisante ou trop élevée dans les
locaux, d’une absence d’intimité aux toilettes ou de mauvaises conditions
sanitaires et hygiéniques (paragraphe 106 ci-dessus). »