mardi 9 décembre 2014

[obs.] La stabilité du contrôle européen de l’arrestation et de la détention des suspects d’actes de piraterie ou de transport de stupéfiants en mer réalisées par les forces militaires nationales en dehors du territoire (remarques sur les arrêts Ali Samatar et Hasan)


1. Bref retour sur les différentes affaires.  Pour la troisième[1] – affaire du Ponant - et la quatrième fois[2] – affaire du Carré d’As -, dans deux arrêts rendus le même jour, après les arrêts Medvedyev[3] - affaire du Winner - et Vassis[4] - affaire du Junior - qui avaient été remarqués, notamment – surtout ? - quant au rejet de considérer le magistrat du parquet français comme une « autorité judiciaire » au sens de la Convention européenne des droits de l’Homme, la Cour européenne de Strasbourg s’est donc prononcée sur la conventionnalité de l’arrestation et de la détention des suspects d’actes de piraterie ou de transport de stupéfiants en mer par les forces militaires françaises en dehors du territoire national. D’abord, le contrôle européen porte sur la légalité de la privation de liberté des suspects – arrestation et détention -, exigence ressortant de l’article 5 § 1er([5]), impliquant que la privation de liberté repose sur une base légale prévisible et précise, concernant des pratiques résultant de la coopération internationale des États et visant à lutter contre la grave criminalité. Ensuite le contrôle porte sur le respect de l’Habeas corpus, prévu par l’article 5 § 3 de la Convention européenne des droits de l’Homme, qui impose que la personne suspectée soit « aussitôt traduite devant un juge ou un autre magistrat habilité par la loi à exercer des fonctions judiciaires », concernant des cas où, nécessairement, le moment de la présentation du suspect devant le juge se trouve fortement décalée du moment de l’arrestation, du fait de l’éloignement géographique séparant les deux lieux. Sans grande surprise, les deux derniers arrêts Ali Samatar et Hasan n’apparaissent pas novateurs, reprenant en grande partie les principes développés antérieurement par la jurisprudence européenne : celle-ci apparaît pour l’essentiel stabilisée, qu’il s’agisse de l’analyse rigoureuse de l’existence d’une base légale prévisible et précise à la privation de liberté (n° 2), qu’il s’agisse du maintien d’une marge d’appréciation dans le contrôle de la célérité de l’acheminement des suspects sur le territoire (n° 3), qu’il s’agisse du refus d’imposer un contrôle en temps réel par l’autorité judiciaire de la détention des suspects (n° 4), qu’il s’agisse de la reconnaissance de l’aptitude du juge d’instruction français à l’exercice de l’Habeas corpus (n° 5), ou qu’il s’agisse enfin du rejet de la validité du placement en garde à vue des suspects à leur débarquement sur le territoire national (n° 6).