dimanche 25 juin 2017

[chron.] Le contrôle du bien-fondé de la garde à vue : évolutions et résistances dans la jurisprudence de la Chambre criminelle

1. Le rejet d’une conception purement policière. La garde à vue a fait l’objet ces dernières années de nombreuses réformes qui ont abouti à modifier la nature de la mesure, laquelle n’est définitivement plus purement policière. L’action policière est limitée par les droits qui sont reconnus au suspect et rattachés, au premier titre, à la défense. D’autre part, le contrôle de la garde à vue en temps direct par l’autorité judiciaire est imposé par l’article 66 de la Constitution [Cons. const., déc. n° 93-326 DC du 11 août 1993]. C’est donc sous le double effet de l’inscription dans la garde à vue, premièrement, des droits de la défense liés à la nature pénale de la mesure, et, deuxièmement, des droits et garanties liés à sa nature privative de liberté, que la garde à vue a quitté le champ de l’arbitraire policier. Le régime de la garde à vue reste néanmoins encore fortement marqué par la préoccupation de ne pas entraver l’action policière au détriment des droits de l’individu en état d’arrestation. La garantie judiciaire reste d’une intensité modérée. D’abord, le contrôle en temps direct de la garde à vue peut être assuré, au moins pendant quarante-huit heures, par l’autorité judicaire dépendante – c’est à dire le magistrat du parquet [Cons. const., déc. n° 2010-80 QPC du 17 déc. 2010], et même plus longtemps, en ajoutant à une durée de quarante-huit heures, la durée de vingt heures pendant laquelle le suspect peut être retenu avant son défèrement devant le juge d’instruction, le juge des libertés et de la détention ou le Tribunal correctionnel saisi en comparution immédiate. Au-delà de quarante-huit heures, si l’intervention de l’autorité judiciaire indépendante statutairement – c’est-à-dire le magistrat du siège – est exigée pour prolongée la garde à vue [Cons. const., déc. n° 80-127 DC des 19 et 20 janv. 1981], le juge compétent n’est pas nécessairement indépendant sur le plan fonctionnelle [Cons. const., déc. n° 2004-492 DC du 2 mars 2004] et peut cumuler cette fonction de contrôle de la garde à vue à la fonction de direction des investigations.